does the sight of a grave make you feel all alone ? (( bruce ))

Does the sight of a grave make you feel all alone ?

dick grayson && bruce wayne

It has been said that time heals all wounds. I do not agree. The wounds remain. In time, the mind, protecting its sanity, covers them with scar tissue, and the pain lessens, but it is never gone. ― Rose Kennedy.

Il pleut. C’est drôle comment par ici l’eau semble tomber du ciel chaque jour, peu importe la période de l’année. C’est l’une des premières choses qui t’ont frappé quand t’es arrivé à Gotham, tout marmot déjà, si bien que tu t’es mis à imaginer la grande sœur de Metropolis voulant expier ses pêchers – vaine lutte contre la corruption éternellement imprégnée dans ses murs. Ou laver le sang qui a coulé sur ses pavés sales ; le sang des tiens. Comme un voile, hypnotique, les milliers de gouttelettes continuent à valser tristement, danse macabre qui s’infiltre dans tes cheveux bruns et glisse le long de ton cou. Tu remontes le col de ta veste et frissonnes légèrement, bien trop frileux pour un jour t'habituer à ce climat. Les mains dans les poches, tu poursuis ta marche silencieuse, songeur et imperturbable, comme un insecte attiré par la lumière. Sauf que la lumière, ces derniers jours tu ne sais plus vraiment où la trouver. Elle semble éteinte, dans cette ville tout du moins, alors que Gotham traverse probablement ses heures les plus sombres. Cette même Gotham qui a vu s’envoler ton enfance, mais aussi berceau de ton renouveau, que tu chéris autant que t’essayes de fuir. Cette Gotham, que tu aurais aimé sauver mais qui part en lambeau.
T’es un vaillant, Nightwing. T’as toujours été un modèle d’optimisme et de positivité, du gamin vif et coloré dans un environnement monochrome, au jeune homme que t’es devenu, source d’inspiration pour une nouvelle génération de héros ; malgré toutes les tragédies que t’as traversées, t’as toujours trouvé le moyen de te relever, plus fort et plus déterminé encore, pour faire résonner les échos de tes rires à nouveau - avec à chaque fois la certitude de pouvoir avancer. Tu sais prendre les coups, bien plus encore qu’on ne le pense, et par nature t’as cette faculté magnifique que de pouvoir transcender toutes ces émotions néfastes et toxiques en une énergie réellement positive, qui te pousse à grandir, et aider ton entourage à grandir avec toi.  
Mais aujourd’hui, t’es épuisé. Epuisé de lutter quand tout ton monde semble tourner à l’envers. Tout ce que tu veux, tout ce que t’as toujours voulu, c’est la sécurité et le bonheur de tes proches. Echec cuisant, quand tu portes encore la douleur incommensurable de Barbara de perdre son être le plus cher, quand Tim est en cavale, et Jason, quelque part, cherche encore à se faire du mal.
Puis il y a Bruce. Bruce, que tu vois sombrer chaque jour un peu plus, lui que t’as toujours admiré, lui à qui tu dois tant. Un mentor, un ami. Un père, que beaucoup tendent à ne plus voir que comme un monstre, quand tu sais qu’au fond, il est toujours le même homme dont t’as réussi au fil des années à déchiffrer la complexité.  
Plus que jamais auparavant, tu vois ta famille se déchirer alors que chacun de son côté souffre silencieusement. C’est ça, le problème, quand tous les membres d’une famille sont trop fiers et butés, pour s’appuyer les uns sur les autres. Quand tous, refusent de se parler.
Mais toi, t’as toujours été un parleur.
Pourtant, maintenant, tu n’as personne à qui parler, quand tu t’efforces de faire illusion devant le monde entier. Tu es celui qui est sensé sourire, apporter un brin de positivité même quand la lumière s’en est allée. Tu veux être ce roc, qui malgré les temps difficiles perdure dans la tempête, celui auquel on peut se raccrocher. Alors, t’as pas le droit de laisser paraître tes propres blessures, de trahir ces doutes et inquiétudes qui te rongent. Parce que si même toi tu flanches, alors que reste-t-il comme espoir ? Comment croire à de meilleurs lendemains ?
Parfois, la vie à Blüdhaven te manque, alors que tout semblait bien plus simple. Parfois, t’as la sensation frustrante d’avoir trahi la ville dont t’étais devenu le protecteur. Mais tu ne choisis jamais la simplicité, encore moins quand les gens que tu aimes ont besoin de toi.

T’arrives presque au manoir à présent. Tes côtes te font souffrir, ton œil, malgré la glace, continue d’enfler alors que la couleur rougeâtre commence maintenant à tourner sombre. Une goutte d’eau coule le long de la mèche rebelle sur ton front, et tu secoues la tête, passes tes doigts à travers tes cheveux, mais là encore ta poitrine proteste laborieusement. Sous ce nouveau régime tu peines à trouver ta place. Aussi bien dans ta famille, en tant que héros - et désormais en tant que citoyen. Le décès de Jim n’a fait que rendre les choses encore plus difficiles pour toi, autant entre Bruce et Barbara, que dans ta position au sein du GCPD. T’as l’impression constamment d’être sur le fil, entre deux camps opposés et de n’être souhaité dans aucun d’entre eux. Etrange sensation, pour quelqu’un comme toi qui a toujours fait passer le bien-être des autres avant le sien. T’as intimement peur de la solitude, Richard, et pourtant jamais tu ne t’es senti aussi seul, pas même quand t’as perdu tes parents. Parce que même à l’époque, il y avait cet homme qui serrait fort ton épaule et te laissait sangloter. Il y avait Bruce.
Et maintenant, tu dois avouer que Bruce te manque.
Tu vis certes au manoir, néanmoins dans cette immense forteresse, il est bien aisé de ne pas croiser d’autre âme qui vive des jours durant, surtout avec des horaires aussi particuliers que les vôtres. Ta vie se passe à deux-cent à l’heure, jonglant difficilement entre un job à plein temps dans les forces de l’ordre et tes activités nocturnes. Et tes dernières soirées, tu les as passées avec Barbara, parce que t’as peur de la laisser seule. Peur pour sa sécurité, et après sa dernière escapade, peur pour la sécurité des autres.
Ce soir cependant, t’as prévenu Alfred : tu seras là pour le dîner. Et pour une nuit complète. Parce que Barbara n’est pas la seule qui t’inquiète après la mort de Gordon.

La journée a été éprouvante. Quand enfin t’arrives à destination, le maître des lieux n’est pas encore rentré, sans surprise tu ne trouves que Alfred qui t’offre quelques-uns de ses légendaires cookies – qui à chaque fois te rappellent pourquoi trouver un nouvel appartement ne fait pas forcément partie de tes priorités - et une nouvelle poche de glace à mettre sur ton œil. L’homme a cessé de vous questionner sur vos contusions il y a fort longtemps à vrai dire. Petite collation après laquelle tu étends ton corps épuisé sur le sofa de l’un des petits salons pour échanger quelques textos avec Wally, et tu ne te sens pas même sombrer.
La prochaine chose que tu enregistres, c’est que quand t’émerges tes cheveux sont toujours humides mais t’as une couverture drapée sur les épaules, courtoisie d’Alfred t’imagines naturellement ; et Bruce se tient devant toi, proche, trop proche de ton espace personnel. Plus que sa présence, ce qui te fait sursauter c’est le fait de ne pas l’avoir entendu approcher, quand t’es toujours hyperconscient même dans ton sommeil. Tu te redresses sur le sofa, retires la glace de ton visage et lui adresses un sourire chaleureux.
- Hey, B.
Tu l’accueilles d’un mouvement de tête reconnaissant et ta voix joviale habituelle, bien que quelque peu groggy de ton réveil.
- You’re home early today. I'm not even presentable yet !
Et pourtant, tu n’as pas la moindre idée de combien de temps t’as dormi.