it never rains but it pours. (ft. dick)

it never rains but it pours.

nightwing && batgirl

Out of suffering have emerged the strongest souls. The most massive characters are seared with scars. ― Khalil Gibran.

Les ténèbres, chaque jour, semblent un peu plus engloutir cette ville, tandis que le deuil déjà étale son long manteau au-dessus de sa tête, ombre qui plane comme une épée de Damoclès, menace de vous prendre, tous, jusqu'au dernier. Ce n’est pas la première fois que la Mort sillonne ces capillaires urbains ; ce ne sera pas la dernière non plus, tu le sais. Mais chaque croix ajoutée à votre bannière, autrefois symbole de justice et d’espoir, fait encore un peu plus mal, alors que tu n’es plus vraiment certain de savoir si t’es du bon côté.
Quelque part entre le GCPD et l’Oiseau de la Nuit, t’as trouvé un moyen de tenir bon cependant : tu te perds dans le travail acharné, patrouilleur, détective ; justicier. Le reste du temps tu veilles à ce que les artistes de ton cirque ne manquent jamais de rien. Les nuits sont courtes, et ton corps abusé te supplie de lever un peu le pied, rien qu’un instant de répit pour ne pas succomber, mais tu n’en fais qu’à ta tête. I'll sleep when i'm dead. Beaucoup diront que c’est ta vocation, que tu fais toutes ces choses par gratuité de cœur. C’est vrai, t’as toujours été tourné vers les autres, le palpitant ouvert et la main tendue ; mais pour être honnête, là n’est pas toute la vérité. C’est aussi ce qui t’empêche de réfléchir, coupe tes pensées et te permet d’avancer. Et surtout, ça t’empêche de ressentir ta solitude qui chaque jour s’accentue. Être seul, encore, a toujours été ta plus grande crainte, celle qui te retourne les tripes et noue tes entrailles. Pourtant voilà que ta famille s’éloigne, que tu perds des amis, des alliés, de par ta proximité avec le maire, ou parce qu’ils ont participé à la bataille de trop. Tes collègues, aussi, te rejettent, pour la plupart ; parce qu’ils sont opposés à Bruce et que tu refuses de lâcher celui à qui tu dois la vie, tensions qui s’accentuent depuis que le commissaire n’est plus là pour te protéger. Tombé au combat, pour beaucoup à cause de ton père. Jim, encore un ami, un allié, qui s’en est allé. Tu te sens seul, parce que les gens autour de toi souffrent, et que t’es incapable de les aider. Et que tu ne veux pas leur ajouter de la peine, en leur confiant tes propres doutes, tes propres émotions. Alors tu gardes tout pour toi, seul, enfermé dans les songes qui te hantent une fois glissé entre tes draps. Raison de plus pour éviter de fermer l’œil, alors que de toute manière, rêver te fatigue davantage.

Revêtir l’uniforme de Kevlar au moins te permet de conserver un certain équilibre mental. Parce que quand tu deviens Nightwing, tes émotions restent au vestiaire. Parce que l’Oiseau Bleu de Gotham est libre, fait ce pour quoi il est né : virevolter au-dessus du vide, planer entre les gratte-ciel. La voltige. C’est ce qui te soulage et t’apaise, parfois même tu sens les mains de tes parents glisser sur tes poignets, t’accompagner comme la brise du vent sur ton visage, et enfin tu te souviens de l’essence même de ton être. Ce qui fait de toi cet être humain admirable, sensible et fort à la fois, le cœur rempli d’amour. Celui qui, même au plus bas, continue éternellement d’espérer.

Pourtant ce soir, ce n’est pas le réconfort que tu trouves tout là-haut, ce n’est pas non plus la promesse d’une bataille qui te permettra d'évacuer ce surplus de frustration ; mais la panique pure suivie d’une grande part d’inquiétude.
– To every unit, stop whatever you're doing right now and neutralize batgirl. now.
Neutraliser ? What the f… Ton cœur ratte un battement, et ton visage, rapidement, perd sa couleur. Tes doigts, sans prendre le temps de réfléchir, trouvent le communicateur de ton masque, tu t'enquis. – Batgirl ! Batgirl ? Le néant. – This is Nightwing, where are you ? Please, answer me. Plusieurs tentatives, soldées toujours par le grésillement statique à l’autre bout de la ligne sécurisée. Mais toi, t’as déjà activé le traqueur sur tes lentilles, et suis ce point rouge qui clignote à quelques blocs de là, immobile. La gorge nouée, t’ignores à quoi t’attendre.

– No, stop ! T’amortis ta chute avec grâce alors que t’atterris devant un officier déjà sur place, arme de service inutilement pointée devant lui et bientôt au sol par un de tes bâtons d’escrima. Autour la foule commence à s’accumuler, pourrait devenir difficile à contenir. Toi, néanmoins, tout ce qui t’intéresse, c’est la demoiselle au centre de cette cohue, les phalanges aux couleur de sa rage, teintées de carmin - et les traits crispés. Cette colère tu la connais, tu sais comment elle consume même les plus sages, comment elle détruit de l’intérieur. Tout comme cette vision d’horreur te déchire. Mais pour elle, tu te détaches de ces émotions, tu compartimentes. Tu gardes ton sang-froid, droit et stoïque alors que tu t’approches, défies quiconque d’intervenir.
– Garde tes beaux discours pour James Gordon.
– Batgirl ! Autorité qui crève de ce simple nom, tu espères pour capter son attention.
– Please ! Plea…se, she’s gon.. gonna kill me… Tes yeux glissent sur la malheureuse victime de sa rage, poupée de chiffon qui lutte désormais contre son propre sang, gargouillis presque inaudibles en guise de supplications. Mais toi, pourtant si respectueux de la valeur de la vie sous toutes ses formes, tu fronces les sourcils et lèves le menton. Supérieur. Méprisant. Tu sais qui il est, tu étais présent ce jour-là, et tu as vu les vidéos.
– She could, tu souffles tout simplement, froidement. – Maybe she should. Du déchet qui git à vos pieds, ton regard passe au visage de Barbara, et tu poses une main doucement sur son poing. – But… She won’t.
Difficile de garder ses croyances, de penser que quelqu’un là-haut veille sur ce qui vit en ce bas-monde, quand un homme aussi bon que James Gordon connaît un destin aussi tragique. Pourtant tu persistes à croire qu’aucun humain ne devrait avoir le droit de vie ou de mort sur un autre humain. Et t’as encore suffisamment de recul, pour savoir que jamais elle ne pourrait se pardonner son acte. Tu la connais, tu la connais presque autant qu’elle te connaît.
– Because she’s the kindest human being that I know. Please Batgirl, don’t let him take that from you. He’s not worth it.

Tu aimerais tellement qu'elle se voit au travers de tes propres yeux, qu’elle se rende compte à quel point elle fait chavirer ton cœur, pour le meilleur comme pour le pire. Que par ton regard, elle réalise que même si sa lumière semble éteinte, elle reste indéniablement la plus belle personne au monde, celle qui te donne la force d’avancer dans le noir, la Lorelei du navire dans lequel t’as embarqué il y a toutes ces années. Pourtant tu sais qu’elle souffre, profondément, tu sais que cette violence, cette rage, ce n’est pas elle, c’est l’incompréhension, c’est le deuil. Et silencieusement, tu souffres avec elle, parce que ses émotions sont les tiennes.
Tu baisses le ton, adoucit ta voix aussi, de manière à ce que personne ne puisse entendre tes mots à part Batgirl.
– That’s not what he would have wanted…
Et même si tu détestes le cliché de cette phrase déjà toute écrite, tu sais à quel point elle est vraie, et tu sais que quelque part, elle le sait aussi.
Gordon, n’aurait jamais voulu que a fille gâche sa vie pour le venger, et te maudirait pour ne pas l’en avoir empêché par tous les moyens.